LEQUIPE DU JOUR
Vinokourov deux fois positif !
Le second contrôle du Kazakh, dont la contre-expertise se déroulera très vite, est également positif.
COMMENT ALEXANDRE VINOKOUROV
a-t-il pu tenter le diable à ce point en sadonnant
aux affres de la transfusion homologue,
procédé facilement détectable depuis lété
2004 ? Comment pouvait-il espérer passer à
travers les mailles dune recherche analytique
rendue possible par les travaux
conjoints de lInstitut des sports de Canberra
(Australie) et par le Laboratoire antidopage
de Lausanne (LAD), et alors que la fenêtre de
détection de la manipulation oscille entre
quinze jours et trois semaines selon le
volume transfusé ?
Comment le Kazakh, flamboyant samedi lors
du chrono dAlbi, à la dérive le lendemain sur
la route du plateau de Beille et revenu à la vie
lundi sur les flancs de Peyresourde, pouvait-il
ne pas comprendre quil attirerait lattention
Les grandes
affaires
du Tour
Voici les grands scandales qui ont
émaillé les Tours de France de
laprès-guerre :
1967 : Lors de la 13 étape, Tom
Simpson sécroule sur les pentes du
Ventoux et décède un peu plus tard,
vraisemblablement sous leffet de produits
dopants. Les premiers contrôles
aux arrivées seront institués lannée
suivante.
1978 : À lissue de la 16e étape, le
Maillot Jaune, Michel Pollentier, est
pris en flagrant délit de tricherie lors du
contrôle (il a dissimulé une poire avec
de lurine propre) et est exclu sur-lechamp.
1988 : Le Maillot Jaune, Pedro Delgado,
est contrôlé positif à un diurétique
aux effets masquants, lors de la
17e étape. Il bénéficie dun non-lieu (et
remportera lépreuve) car le produit,
qui figure sur la liste interdite du CIO,
nest pas encore inscrit sur celle de
lUCI.
1998 :Une voiture de léquipe Festina
contenant des produits dopants est
arrêtée à la frontière entre le France et
la Belgique. Toute la formation est
exclue. Puis ce sera au tour de TVM
suite à une saisie de produits datant du
mois de mars.
1999: Lance Armstrongest contrôlé
positif aux gluco-corticoïdes. Mais il va
présenter une prescription médicale
antidatée pour lutilisation dune pommade
destinée à soigner les douleurs à
la selle, et remporter le premier de ses
sept Tours.
2002 : À lissue de la 6e étape, le
Maillot Jaune, Igor Gonzalez de Galdeano,
présente des traces anormalementélevées
de Salbutamol. LAMA se
prononce en faveur dun contrôle positif,
mais une autorisation thérapeutique
validée par lUCI lui permet de
poursuivre la course (5e au final). Il sera
par la suite suspendu 6 mois sur le territoire
français. Le soir de larrivée du
Tour, lépouse de Raimondas Rumsas,
qui vient de terminer 3e, est interpellée
à Chamonix avec des produits
dopants.
2006 : Deux jours avant le départ,
neuf coureurs (dont les favoris Ullrich
et Basso) sont écartés en raison de leur
implication présumée dans lOpération
Puerto.
Et quatre jours après larrivée, on
apprend que le vainqueur, Floyd Landis,
a été contrôlé positif à la testostérone
à lissue de la 17e étape.
sur ses états de forme si fluctuants ? Les
conduites dopantes ont cela dirrationnelles,
voire de désespérées, quelles ne répondent
parfois à aucune logique. Si, peut-être une. Il
nest guère aisé, aujourdhui, avec des douaniers
et des gendarmes attentifs qui nont
dailleurs rien trouvé lors de leur fouille de
quatre bus déquipes, lundi , de se promener
avec une glacière à la main remplie de
poches de sang
De là à se laisser tenter par le dépannage
dun donneur sur pied compatible même
groupe sanguin, même rhésus , il ny a
quun pas. Dautant quà linstar des transfusions
autologues le sang du sportif est prélevé,
conservé puis transfusé avant leffort ,
les transfusions homologues présentent un
attrait pour la performance identique, soit un
gain sur les capacités physiques du sujet pouvant
aller jusquà trente pour cent, et ce
durant une quinzaine de jours.
Ciblé une deuxième fois
De plus, une transfusion homologue peut
tout à fait se réaliser très rapidement, la veille
ou le matin même de lépreuve, sans autre
matériel quun « tuyau » reliant le donneur
au receveur. Pourtant, depuis Tyler Hamilton
aux Jeux Olympiques dAthènes (échantillon
mal conservé), finalement positif à la Vuelta
de la même année comme son coéquipier
espagnol de chez Phonak, Santi Perez, nul
autre ne sétait aventuré à courir pareils
risques.
Vinokourov a donc tenté sa chance. Il a perdu.
Son échantillon A, le premier, celui consécutif
à sa victoire dans le chrono dAlbi le
samedi 21 juillet à Albi, est très clairement
positif. Cest-à-dire que la population
dhématies minoritaire dans son sang, qui
provient du donneur, est très nettement différenciable
de son propre sang. Les standards
de lAgence mondiale antidopage
(AMA) ont été en loccurrence facilement
atteints et respectés.
La phase danalyse na duré quune journée,
ce qui correspond à la moyenne, screening et
confirmation compris. Le deuxième prélèvement
sanguin opéré sur le leader dAstana,
lundi en fin de journée, ne sera quant à lui
totalement analysé, phase de confirmation
comprise, que ce matin, mais il est dores et
déjà positif. Ce contrôle antidopage sanguin,
diligenté par lUnion cycliste internationale
(UCI), na dailleurs été réalisé que dans le
but de confirmer le résultat du premier test.
Le leader dAstana aurait pu terminer vingtième
de la quinzième étape Foix-Loudenvielle-
Le Louron, il aurait néanmoins été
contrôlé. Ciblé.
Désormais, Vinokourov aura donc bien du
mal à trouver un argumentaire pertinent
pour se défendre, quand bienmêmeil bénéficiera
là aussi de moyens illimités. Même si
lappel de Tyler Hamilton devant le Tribunal
arbitral du sport (TAS) faisant suite à sa suspension
avait été une longue bataille procédurière,
à laméricaine, le premier cycliste
condamné pour transfusion homologue
avait été renvoyé chez lui sans ménagement
par les arbitres.
DAMIEN RESSIOT